Châteaux oubliés le long de la Saône, églises rustiques blotties dans des vallons virgiliens, préhistoire solutréenne et, plus loin, triptyque Lamartinien de Montceau, Milly et Saint-Point…

Et le vignoble de Pouilly-Fuissé enserrant les villages où chaque maison à galerie reste un modèle unique, de la plus modeste à la plus importante.

A 8 kilomètres à l’est de Macon, s’étendent au flanc de deux roches célèbres, cinq villages qui constituent l’entité de l’appellation Pouilly-Fuissé : Vergisson, Solutré, Pouilly, Fuissé et Chaintré. Une succession de cirques dominant la Vallée de la Saône crée les conditions favorables à la culture et à la maturité d’un seul cépage, le Chardonnay très bien adapté aux formations jurassiques argilo-calcaires sur lesquelles il s’épanouit.

Le Chardonnay

Le Chardonnay fait, depuis des siècles, la renommée des grands vins blancs de Bourgogne. Il offre au Pouilly-Fuissé cette robe or-vert, cette finesse, ce moelleux, ce nez fruité, cette profondeur aromatique qui n’ont à proprement parler aucun égal parmi les autres vignobles du monde.

Ce noble cru de Bourgogne du Sud, le Pouilly-Fuissé, est le roi incontesté des vins du Maconnais dont il est le porte-drapeau et le plus exporté des crus bourguignons.

De villages en villages

Le vignoble de Pouilly-Fuissé, accoudé à son voisin immédiat le Beaujolais, enchâssé dans l’écrin de la Bresse aux onctueuses volailles et du Charolais au bétail somptueux, se blottit au cœur même d’une des régions les plus variées et les plus gourmandes de France. L’aire de production englobe 700 hectares étalés sur quatre communes et un hameau : Vergisson, Solutré, Pouilly-Fuissé et Chaintré. Microclimat et emplacement des vignes, sols et sous-sols, fournissent des vins aux nuances et caractéristiques variées.

Vergisson, situé entre deux roches aux formes dolomitiques au-delà de la gorge de Roncevaux, évoque la légende de la fête « Pharamine » encore appelée Farasque. Mais c’est surtout, aujourd’hui, un beau vignoble. André Forest, vigneron, nous a fait apprécier un 89, bien équilibré, vieillissant assez rapidement, qui s’harmonisera parfaitement avec les escargots.

Solutré, site spectaculaire par sa roche qui, plan incliné à l’est, se termine à l’ouest par un à-pic calcaire d’où les habitants de la préhistoire, postés en embuscade, décimaient les hardes de chevaux. Ce très pittoresque village vigneron accueille dans son caveau intercommunal tous les amateurs de Pouilly-Fuissé. Marc Bressand a récolté sur son Domaine de 10 hectares situé au pied de la roche, sur le climat les Bouthières, un 83, très gras, un peu botrytisé, au parfum de miel et de fleurs d’acacia. Voilà un vin pour foie gras ; le 89, vin élevé partiellement en fût de chêne, se trouvera en très bonne compagnie avec des écrevisses et des mets épicés.

Pouilly, souvenir des homélies de Lacordaire. Pour les vignerons, c’est le curieux pèlerinage des Fourmis. En effet le jour de la fête des Sept Douleurs, ils venaient demander à la vierge de préserver leurs « Goutillons » emportés à la vigne de ces indésirables insectes.

Fuissé : situé à mi-côte au-dessus du village de Fuissé, le vignoble des Vincent regroupe une centaine de parcelles et occupe une position géologique particulière. La production moyenne annuelle du Domaine est de 160.000 bouteilles, soit environ 13.000 caisses. Les vins du Domaine sont recherchés pour leur finesse, leur générosité et leur distinction. Les nuances de miel, d’abricot, de vanille, de fruits exotiques, d’amande, dominent avec des notes de musc et de chypre vert. Tous ces vins sont structurés pour le vieillissement. Les millésimes les plus côtés de ces dernières années sont 1986, 1985, 1983, 1982, 1981, 1979, 1978, 1976, 1975, 1971. Les espérances de vie de ces vins sont évidemment variables, mais atteignent toujours, sans problème, une décennie. Jean-Jacques Vincent, issu d’une famille de tradition viticole depuis quatre générations, propose trois qualités de Pouilly :

• Pouilly-Fuissé « Cuvée Première » Domaine de l’Arillière
• Château Fuissé
• Château Fuissé « vieilles vignes » (assemblage de vin de vignes de plus de 25 ans jusqu’à 60 ans)

L’andouillette à la fraise de veau, tournée à la main, qu’Éric Point (cuisinier au restaurant Pouilly-Fuissé) nous mijota, s’harmonisa somptueusement avec le Château Fuissé Vieilles Vignes 1988. Nous avons apprécié ce vin, d’une très belle couleur d’or vert-pâle, sec, mais sans excès, élégant, au fruité délicat de noisette, au nez riche d’arômes d’amandier en fleurs, de verveine, auxquels se surajoutent quelques connotations rafraichissantes de citron et de pomme. Ne quittons pas Fuissé sans faire une halte dans les caves de Georges Burrier pour y apprécier un Pouilly-Fuissé 1989, aux très beaux reflets jaunes verts, aux arômes pain grillé et amandes fraîches, beaucoup de gras et de longueur en bouche. C’est une excellente cuvée pleine d’avenir ; le 1988, vin plein en évolution rapide, à boire tout de suite ou à conserver avec précaution.

Chaintré. Du haut de sa colline, Chaintré contemple la Saône, et ses maisons vigneronnes coiffées de tuiles romaines annoncent la Bourgogne Méridionale. Le plus important producteur de Pouilly Fuissé est la Cave de Chaintré : 5.000 hectolitres avec plusieurs Clos : les Reyssiers, les Chevrières, les Verchères. Nous y fîmes une intéressante dégustation d’un Chevrières 89, passé en fût de chêne, vin charpenté, puissant, odeur de pain grillé, rond, beaucoup de caractère, volumineux, avec le « Gras » de Pouilly plus marqué à Chaintré qu’ailleurs. Le Pouilly-Fuissé, qu’il soit de Chaintré, de Fuissé, de Solutré-Pouilly ou de Vergisson est un grand cru de Bourgogne. D’or blanc aux éclats d’émeraude, d’un bouquet séduisant et ample, sec et vigoureux, plein de finesse, d’élégance, délicat, distingué.